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Tom Pouce ou l'histoire du vrai Petit Poucet.
Jacob et Wilhelm Grimm
Il était une
fois un pauvre paysan. Un soir qu'il était assis près de
l'âtre et tisonnait le feu pendant que sa femme filait, il
dit: "Qu'il est triste que nous n'ayons pas d'enfant. Chez nous,
tout est silencieux ; chez les autres il y a du bruit et l'on
est joyeux."
"Oui," répondit sa femme en murmurant, "même s'il n'y en
avait qu'un, même s'il était tout petit, grand comme un
pouce, je serais bien contente. Nous l'aimerions quand même
de tout notre coeur."
Il arriva alors que la femme tomba malade. Au bout de sept
mois, un enfant naquit, fort bien conformé, mais pas plus
grand que le pouce. Alors, les parents dirent:
"Il est comme nous l'avions souhaité; il faut que nous
l'aimions."
Ils le nommèrent Petit Poucet. Ils ne le laissèrent jamais
manquer de nourriture. Mais l'enfant ne grandissait pas. Il
restait comme aux premières heures de sa naissance. Ses yeux
étaient intelligents et il apparut bientôt comme très
éveillé et très agile; tout lui réussissait.
Un jour, le paysan s'apprêta pour aller à la forêt couper
du bois et il se disait: "je voudrais bien que quelqu'un
m'y amène la charrette."
"Oh ! père ! cria le Petit Poucet, je vous amènerai la
charrette, remettez-vous en à moi: elle sera dans la forêt
à l'heure voulue."
Alors l'homme se mit -à rire et dit:
"Comment cela se pourrait-il? Tu es bien trop petit pour
tenir les rênes du cheval."
Ça ne fait rien, père. Pourvu
que maman l'attelle. je me placerai dans l'oreille du cheval
et je lui dirai où il doit aller."
"Bon!" dit le père. "Essayons!"
Lorsque le moment fut venu, la mère attela et plaça le
Petit Poucet dans l'oreille du cheval et il lui indiqua le
chemin à suivre. "Hue ! Oh ! Dia !" On eût dit un vrai
charretier et la voiture prit le bon chemin, vers la forêt.
Juste au moment où elle arrivait à un tournant et comme le
petit criait "Dia !", deux étrangers s'approchèrent.
"Ça alors!" dit l'un, "qu'est-ce que cela? Voilà une
voiture, on entend le charretier, mais on ne le voit pas."
"Ce n'est pas normal," dit le second. "Nous allons suivre la
charrette et voir où elle s'arrêtera."
La voiture, cependant, allait son chemin, tout droit vers le
lieu où l'on abattait le bois. Lorsque le Petit Poucet
aperçut son père, il lui cria:
"Tu vois, père, me voilà avec la charrette. Fais-moi
descendre."
Le père retint le cheval de la main gauche et, de la droite,
il sortit son petit garçon de l'oreille. Celui-ci alla
s'asseoir sur un brin de paille, tout joyeux. Lorsque les
deux étrangers virent le Petit Poucet, ils restèrent muets
d'étonnement.
L'un d'eux prit l'autre à l'écart et lui dit:
"Écoute voir : ce petit pourrait faire notre bonheur si
nous le montrions pour de l'argent dans une grande ville. Il
n'y a qu'à l'acheter."
Ils s'approchèrent du père et lui dirent:
"Vendez-nous le petit homme. Avec nous, il sera bien."
"Non," répondit le père. "Je l'aime et pour tout l'or du
monde il ne serait pas à vendre."
Mais le Petit Poucet qui
avait entendu, grimpa sur son épaule et lui murmura à
l'oreille:
"Père, vends-moi donc. je m'arrangerai bien pour revenir."
Alors le père le vendit aux deux hommes pour une belle
pièce d'argent.
"Où veux-tu t'asseoir?" lui demandèrent-ils.
"Bah! mettez-moi sur le bord de votre chapeau. je pourrai
m'y promener tout en regardant le paysage et je ne tomberai
pas."
Ils firent selon sa volonté et lorsque le Petit Poucet eut
pris congé de son père, Ils partirent en l'emmenant.
Ils marchèrent jusqu'au crépuscule. Alors le Petit Poucet
dit: "Faites-moi descendre; j'ai un besoin."
"Reste là-haut," dit l'homme sur le chapeau duquel il se
trouvait. "Ça ne me fera rien; il arrive bien que les
oiseaux aussi me laissent tomber quelque chose dessus."
"Non," dit le Petit Poucet, "je sais de quoi il s'agit,
faites-moi vite descendre." L'homme enleva son chapeau et posa
le Petit Poucet dans un champ au bord de la route. Alors
celui-ci sauta et gambada un moment au milieu des mottes de
terre puis il s'enfila tout à coup dans un trou de souris
qu'il avait découvert.
"Bien le bonsoir, Messieurs, rentrez chez vous sans moi!"
leur cria-t-il en riant.
Ils s'approchèrent du trou: y plongèrent un bâton, mais
en vain ! Le Petit Poucet allait toujours plus loin et, comme
il allait bientôt faire complètement nuit, plein de dépit,
les deux hommes durent rentrer chez eux les mains vides.
Lorsque le Petit Poucet s'aperçut qu'ils étaient partis, il
sortit de son trou. "C'est bien dangereux de marcher la nuit
dans un champ," se dit-il, "on se rompt facilement le cou et
les jambes!" Par chance, il se heurta à une coquille
d'escargot vide. "Grâce à Dieu!" dit-il, "voilà un abri
sûr pour passer la nuit." Et il s'y installa.
Comme il allait s'endormir, il entendit deux hommes qui passaient.
L'un disait: "Comment allons-nous nous y prendre pour voler au riche
curé son or et son argent?
"Moi Je pourrais te le dire," s'écria le Petit Poucet.
"Qu'est-ce que c'est?" demanda l'un des voleurs effrayé.
"J'ai entendu parler quelqu'un."
Ils restèrent immobiles et écoutèrent.
Alors le Petit Poucet dit à nouveau: "Emmenez-moi et je vous aiderai."
"Où es-tu donc?"
"Cherchez par terre et repérez d'où vient la voix,"
répondit-il.
Finalement, les voleurs le découvrirent et ils le
soulevèrent."Petit avorton, comment veux-tu nous aider?" lui dirent-
ils.
"Eh bien! répondit-il, "je me glisserai dans la chambre du
curé, à travers les barreaux de fer et je vous passerai
tout ce que vous voudrez."
"D'accord," dirent-ils. "On va voir ce dont tu es capable."
Lorsqu'ils arrivèrent au presbytère, le Petit Poucet
s'introduisit dans la chambre et cria aussitôt de toutes ses
forces: "Voulez-vous avoir tout ce qui se trouve ici."
Les voleurs eurent peur et dirent:
"Parle donc plus bas, tu vas éveiller quelqu'un."
Mais le petit Poucet fit comme s'il n'avait pas compris et
cria à nouveau:
"Que voulez-vous? Voulez-vous avoir tout ce qui se trouve
ici?"
La cuisinière, qui couchait à côté, entendit, se dressa
sur son lit pour écouter. Par peur, les voleurs s'étaient
un peu éloignés. Finalement, ils reprirent courage et
songèrent: "Le petit bonhomme veut se moquer de nous." Ils
revinrent et lui murmurèrent:
"Sois sérieux et passe-nous quelque chose."
Alors le Petit Poucet cria de nouveau aussi fort qu'il put.
"Je vais tout vous donner. Tendez la main à l'intérieur."
La bonne, qui était aux écoutes, l'entendit très
clairement. Elle bondit hors du lit et poussa la porte. Les
voleurs s'enfuirent et coururent comme s'ils avaient le
diable aux trousses. La bonne, qui ne voyait rien, alla
chercher de la lumière. Lorsqu'elle revint, le Petit Poucet,
sans qu'elle l'eût aperçu, se faufila dans la grange. La
bonne chercha dans tous les coins et, ne trouvant rien, elle
regagna son lit, pensant qu'elle avait rêvé les yeux
ouverts.
Pendant ce temps, le Petit Poucet était monté dans une auge
à foin et avait trouvé une bonne place pour dormir. Il
voulait s'y reposer jusqu'au jour et revenir ensuite chez ses
parents. Mais il allait connaître d'autres aventures ! Oui,
il y a beaucoup d'affliction et de misère de par le monde !
À la pointe du jour, la bonne se leva pour venir nourrir les
bêtes. Elle alla d'abord dans la grange où elle prit une
brassée de foin. juste là où se trouvait le Petit Poucet !
Il dormait si fort qu'il ne s'aperçut de rien et ne
s'éveilla qu'au moment où il se trouva dans la gueule d'une
vache qui l'avalait avec son foin.
"Mon Dieu," s'écria-t-il, "comment suis-je arrivé entre les
meules d'un moulin!"
Mais il comprit bientôt où il se trouvait. Il s'agissait de
faire attention à ne pas être écrasé entre les dents.
Ensuite, il lui fallut glisser jusque dans l'estomac.
"On a oublié les fenêtres dans cette chambre!" dit-il, "et
le soleil n'y pénètre pas. Il n'y apporte pas de lumière!"
De toute façon, l'appartement ne lui plaisait pas. Et voici
le plus grave: il entrait de plus en plus de foin par
l'orifice et la place commençait à manquer. Finalement,
saisi de peur, il cria aussi fort qu'il put:
"Ne me donne plus de foin, ne me donne plus de foin!"
La bonne était justement en train de traire la vache. Quand
elle entendit parler sans voir personne, quand elle reconnut
la voix qu'elle avait ouïe pendant la nuit, elle eut si peur
qu'elle glissa de son tabouret et répandit tout le lait.
En toute hâte elle se rendit chez son patron en criant:
"Seigneur! monsieur le curé, la vache a parlé!"
"Tu es folle," répondit le curé. Mais il alla quand même
à l'étable pour voir ce qui se passait. À peine y avait-il
posé le pied que le Petit Poucet cria à nouveau:
"Ne me donne plus de foin, ne me donne plus de foin!"
Alors le curé lui-même eut peur, crut qu'un mauvais esprit
s'était introduit dans la vache et la fit tuer. On la
dépeça, mais l'estomac, dans lequel se trouvait le Petit
Poucet, fut jeté au fumier. Il eut grand mal à s'en tirer
et, au moment où il en sortait la tête, il lui arriva un
nouveau malheur. Un loup affamé qui passait par là avala
l'estomac tout entier d'un seul coup.
Le Petit Poucet ne
perdit pas courage pour cela. "Peut-être," pensa-t-il, "le loup
voudra- t-il discuter avec moi!" De l'intérieur, il lui cria:
"Cher Loup, je sais où trouver des mets délicieux."
"Où ça?" demande le Loup.
"Il faut que tu entres dans une maison par le trou de
l'évier et tu y trouveras des gâteaux, du lard et des
saucisses autant que tu pourras en manger."
Il lui décrivit avec précision la maison de son père.
Le loup ne se le fit pas dire deux fois, et se dépêcha pendant
la nuit d'entrer par le trou de l'évier. Il mangea tout son
soûl. Lorsqu'il fut rassasié, il voulut repartir. Mais il
était devenu si gros qu'il ne pouvait plus ressortir par le
chemin qu'il avait emprunté pour entrer. C'est bien ce
qu'avait escompté le Petit Poucet. Il se mit à faire dans
le ventre du loup un bruit terrible, tempêtant et criant
autant qu'il le pouvait.
"Veux-tu te taire," dit le loup. "Tu vas réveiller les gens."
"Eh bien! quoi," répondit le Petit Poucet, "toi tu t'es
régalé, moi aussi je veux être joyeux."
Et de hurler de nouveau tant qu'il pouvait.
Finalement, son père et sa mère se réveillèrent. Ils
s'approchèrent de la cuisine et regardèrent par un trou.
Quand ils virent qu'un loup s'y était installé, ils
s'enfuirent. L' homme chercha sa hache. La femme sa faux.
"Reste derrière," dit l'homme. "S'il n'est pas encore mort
quand je l'aurai frappé, taillade-le et ouvre-lui le ventre."
Le Petit Poucet entendit la voix de son père et cria:
"Cher père, je suis ici, dans le ventre du loup."
Et le père, tout heureux:
"Grace au ciel! Notre enfant nous a retrouvés!"
Il demanda à sa femme de ne pas se servir de la faux pour ne
pas blesser le Petit Poucet. Il asséna sur la tête du loup
un tel coup de hache que celui-ci tomba raide mort. Ils
cherchèrent alors un couteau et des ciseaux, lui ouvrirent
le ventre et en retirèrent leur petit.
"Ah!" dit le père, "comme nous nous sommes fait du souci
pour toi."
"Cher père, j'ai roulé ma bosse de par le monde, grâce
soit rendue que je puisse de nouveau respirer l'air pur."
"Où donc-as-tu été?"
"Ah, père, je me suis trouvé dans un trou de souris, dans
la panse d'une vache, dans le ventre d'un loup, maintenant,
je reste auprès de vous."
"Et nous ne te revendrons plus pour toutes les richesses du
monde," dirent les parents en embrassant leur cher Petit
Poucet.
Ils lui donnèrent à manger et à boire et lui firent faire
de nouveaux habits car les anciens avaient été bien abimés
au cours du voyage!
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